Si vous connaissiez quelqu’un qui n’a jamais vu un seul film de sa vie, quel film lui recommanderiez-vous? Seriez-vous capable de trouver un film tellement bon, tellement génial, ou qui représente tellement bien ce qu’est le cinéma et ce qu’il a à offrir, que votre ami sera garanti de tomber amoureux du cinéma?
C’est un peu la question qu’on se pose lorsque vient le temps de recommander une bande dessinée à quelqu’un qui n’en lit pas.
On ne veut pas recommander quelque chose de trop long, et épuiser sa persévérance. Ou quelque chose de trop complexe, parce qu’il n’est pas encore familier avec le vocabulaire du média. Ou quelque chose de trop simple, quelque chose d’accessible mais qui lui fera dire: « C’est tout? »
Ainsi, le mieux que je puisse faire, je crois, c’est de vous recommander quelques séries qui m’ont séduit et espérer, humblement, qu’elles fassent la même chose pour vous.
Avant de commencer, je vous recommande d’écouter la vidéo How to Get Into Comic Books par Patrick (H) Willems. C’est grâce à elle que mon exploration de la bande dessinée a débloqué. Idéal pour débroussailler les bases!
Si vous ne trouvez pas votre compte ici, ou si vous avez déjà en tête un personnage que vous souhaitez découvrir en premier (ou si vous ne savez pas comment vous procurer ces bandes dessinées), jetez un coup d’oeil à la page Ressources.
Marvel

Le Daredevil de Frank Miller
Tout est là: des personnages complexes, une ambiance de film noir, des scènes d’action en technicolor, un peu de surréalisme bédéesque et, même, des ninjas! C’est ce que je croyais que Batman allait être. (Il faut dire que c’est aussi Frank Miller qui a redéfinit Batman, avec The Dark Knight Returns (1986).)
C’est seulement 34 numéros, donc pas trop long. Et si vous en voulez plus, il y a Born Again après.
L’histoire principale commence vraiment au #168, avec la première apparition d’Elektra, mais je vous recommande vraiment de commencer au #158, pour vous mettre dans l’ambiance et vous familiariser avec le personnage. Le #163, par exemple, est un de mes numéros préférés, où Daredevil se bat contre le Hulk. Vous y comprendrez pourquoi le surnom de Daredevil, c’est The Man Without Fear.
Quoi lire?
Daredevil (v.1, 1964), #158 à 191
Publié de 1979 à 1983
Continuez avec:
Daredevil (v.1, 1964), #226 à 233 (Born Again)

Les X-Men de Chris Claremont
C’est peut-être Stan Lee et Jack Kirby qui ont créé les X-Men, mais c’est Chris Claremont qui les a rendus immortels. Grâce à lui, les X-Men sont devenus la franchise la plus populaire de toute la bande dessinée.
Le numéro Giant-Size X-Men #1 (1975) introduit l’équipe qui est si familière, avec Cyclops, Storm, Wolverine, Nightcrawler et Colossus, entre autres.
Puis la plume de Claremont transporte les X-Men dans la science-fiction et les conflits cosmiques avec la légendaire Dark Phoenix Saga, avant de plonger dans la dystopie avec Days of Future Past, puis l’horreur avec la Brood Saga, où les X-Men affrontent des extraterrestres terrifiants: un mélange du film Alien et des Zergs de StarCraft. Vient ensuite la politique pseudo-religieuse avec God Loves Man Kills, et j’en passe!
Et à travers toutes ces aventures rocambolesques, Claremont rend ses personnages profondément humains et transforme cette équipe en une véritable famille aux relations complexes.
Par la suite, la série se démultiplie avec des séries limitées comme Wolverine (1982) et l’excellent Magik (1983), et des spin-offs comme les New Mutants (1983) et X-Factor (1986).
Mais commençons par le début! Si les 46 premiers numéros de Claremont, qui culminent avec la Dark Phoenix Saga, ne vous convainquent pas, il faudra qu’on se parle.
Quoi lire?
D’abord, Giant-Size X-Men #1 (1975), optionnel
The X-Men (v.1, 1963), #94 à 138
Publié de 1975 à 1980
Continuez avec:
J’utilise cet ordre de lecture pour démêler les annuals, les séries limitées et les spin-offs après la Dark Phoenix Saga.

Kamala Khan, la nouvelle Ms. Marvel
C’est la première série que j’ai dévorée. Si vous cherchez quelque chose de léger, d’accessible et de récent, commencez ici.
Kamala Khan est une ado pakistanaise et musulmane du New Jersey. Elle se retrouve avec des pouvoirs qui mélangent ceux de Mr. Fantastic (élasticité) et de Ant-Man/Giant-Man (changement de taille). Elle doit jongler avec l’école, sa famille protectrice, sa vie sociale et ses nouvelles responsabilités de super-héroïne. J’ai l’impression que si on inventait Peter Parker/Spider-Man aujourd’hui, ça donnerait quelque chose comme Kamala Khan/Ms. Marvel.
L’art est merveilleusement beau, les histoires sont drôles et touchantes, les personnages sont attachants, et quelques personnages de l’univers Marvel (Wolverine, Carol Danvers/Captain Marvel, Loki, les Inhumans, etc.) participent à certains numéros.
La première série, Ms. Marvel (v.3, 2014), ne compte que 19 numéros, mais se poursuit directement dans Ms. Marvel (v.4, 2015) qui compte 38 numéros.
Quoi lire?
Ms. Marvel (v.3, 2014), #1 à 19
Continuez avec:
Ms. Marvel (v.4, 2015), #1 à 38
DC Comics

Le Green Lantern de Geoff Johns
Je suis vraiment bien tombé lorsque j’ai choisi Green Lantern (v.4, 2005) comme série pour m’initier à la bande dessinée.
Les histoires sont épiques et les enjeux sont cosmiques. À travers eux, l’univers DC est présenté dans toute son immensité. J’adore comment le pouvoir de Green Lantern est lié à sa volonté (willpower) et que sa plus grande faiblesse est la peur, ce qui crée des conflits hautement symboliques. Et lorsque les arcs narratifs culminent, les pages deviennent une orgie de couleurs en kaléidoscope.
C’est aussi une bonne manière, selon moi, de s’initier à l’interconnexion (parfois complexe) des différentes séries d’un même univers, sans courir le risque de s’y perdre. Après le #20, l’arc narratif est divisé entre cette série et la série qui l’accompagne, Green Lantern Corps (v.2, 2006), qui se concentre sur le corps policier intergalactique duquel Hal Jordan/Green Lantern fait partie. Ces séries génèrent et animent aussi deux crossovers, Blackest Night (2009) et Brightest Day (2010), qui traversent beaucoup d’autres séries de l’univers DC.
Je vous conseillerais de lire Blackest Night et d’éviter Brightest Day. Mais vous pourriez seulement lire la série principale et les quelques numéros de Green Lantern Corps qui s’y rattachent directement. À vous de voir comment vous souhaitez naviguer tout ça. Bref, commencez par Green Lantern (v.4, 2005) #1, et voyez ensuite.
Quoi lire?
Green Lantern (v.4, 2005), #1 à 67
Séries connexes:
Green Lantern Corps (v.2, 2006), #1 à 63
Blackest Night (2009), #0 à 8
Brightest Day (2010), #0 à 24
Green Lantern: Emerald Warriors (2010), #1 à 13

The Legend of Wonder Woman
Une courte série, lumineuse et magnifique, sur l’origine de Wonder Woman et son univers. La série compte 27 courts chapitres, ou l’équivalent de 9 numéros. Si vous avez aimé le film Wonder Woman (2017), vous adorerez cette série.
Quoi lire?
The Legend of Wonder Woman (2016), #1 à 27
Indépendants

Maus
Ça, c’est si vous cherchez quelque chose de sérieux, d’historique et de littéraire. Maus, c’est l’histoire vraie de Vladek Spiegelman, juif polonais qui a survécu à l’Holocauste nazi. Elle est racontée par son fils Art Spiegelman, l’auteur de la bédé, alors qu’il tente aussi de comprendre la relation conflictuelle qu’il a avec son père, et le poids à donner aux souvenirs douloureux, insoutenables, de sa famille.
C’est un roman graphique difficile, important, mais il a une authenticité, une accessibilité et une émotion qui ne sont possibles que grâce à la bande dessinée. Maus fait partie de ces oeuvres qui présentent les horreurs de la nature humaine avec une telle lucidité, une telle honnêteté, qu’elles devraient être lues par tous les êtres humains.
Quoi lire?
Maus, volumes 1 et 2 (ou l’édition complète)
Publié de 1980 à 1991
Continuez avec:
Persepolis, de Marjane Satrapi
Mémoires de l’auteure sur la Révolution iranienne
Publié de 2000 à 2003

Scott Pilgrim
Si vous avez aimé le film culte Scott Pilgrim vs. the World (2010) par Edgar Wright (probablement mon réalisateur préféré), avec son humour, son symbolisme tiré des jeux vidéos et son esthétisme surréel, vous devriez jeter un coup d’oeil au matériel original: les 6 volumes de Scott Pilgrim.
Les dessins de Bryan Lee O’Malley y sont tellement délicieux. Son art manga-esque est parfois intime et introspectif, parfois dynamique et dramatique. C’est une longue réflexion sur la complexité des relations amoureuses (et interpersonnelles), mais aussi un regard franc sur nos démons intérieurs et nos doutes. En plus, c’est canadien!
Et est-ce que j’ai dit que ces dessins étaient délicieux?
Quoi lire?
Scott Pilgrim, volumes 1 à 6
Publié de 2004 à 2010
Continuez avec:
Seconds (2014), aussi écrit et dessiné par Bryan Lee O’Malley
Onomatopées
Un autre blogue par Simon Cordeau
